Un obus percuta le mur d'un building non loin de moi dans une explosion intense suivit d'une énorme fracas de pierre brisées tombant sur le sol. A moitié étourdi par le bruit qui m'avait presque arraché les tympans, je titubait légèrement en m'appuyant sur la partie du mur qui tenait encore debout. Je m'étais habitué au pilonnage incessant de la garde impériale, mais pas encore d'aussi près. Après avoir attendu de retrouver tous mes sens, je repris mon chemin.
Cela faisait trois jours que j'étais arrivé sur Dunerre, et que j'avais pénétré dans la cité-ruche Secondus que la révolte avait transformé en un champ de ruine. Cette ville de taille gigantesque était constituée de plus de soixante-dix niveaux habitables qui se superposaient les uns sur les autres en donnant à l'ensemble une structure pyramidale. Le nivellement relatif à la différence d'étendue d'un niveau à l'autre était de l'ordre du kilomètre, et ces zones en étages étaient les seules parties de la cité-ruche à bénéficier du soleil clément de cette planète. Du temps où elle encore l'une des principales villes de Dunerre, la cité-ruche Secondus abritait plus de trente millions de personnes, réparties selon leur fonction ou leur classe sociale dans les différents étages de la ville. La quasi totalité de la population semblait s'être soulevée, et qui que soit celui qui dirigeait tout cela, il avait eut les moyens pour leur fournir suffisamment d'armes et tous les envoyer contre les troupes loyalistes. Dès le premier jour, je m'étais rendu compte que je m'attaquais à quelque chose de très gros.
Je continuais ma route avec précaution, empruntant désormais des ruelles plus étroite, où le bombardement avait moins de chance de tomber. Derrière moi marchaient six soldats des troupes de chocs du 40ème Dunerrien, qui m'avaient été assignés comme escorte par le colonel Xarlos en charge des opération. Ma rencontre avec cet officier avait été très brève, mais j'avais bien sentit qu'il ne m'aimait pas beaucoup. Probablement ma nature d'intouchable, ou alors l'autorité inquisitoriale que je représentais, ou encore le fait qu'il devait bien avoir trois fois mon âge et un ego facilement froissable. De toute façon, je n'attendais de lui qu'une entière coopération, rien de plus.
Equipé de mon traqueur psy, un appareil capable de détecter l'énergie Warp utilisée par les psykers, je dirigeais notre petit groupe à travers les quartiers désolés du trente-huitième niveau. De temps en temps, nous apercevions au loin des rebelles en train de se diriger vers les combats, qui se déroulaient huit niveaux plus bas. J'avais demandé à ce que les forces ennemies soient occupées au maximum pendant qu'avec mon petit groupe j'infiltrais leurs positions pour tenter de découvrir la cachette des psykers renégats. Je n'avais qu'un faible signal au début, mais la puissance des ondes warp s'amplifiaient depuis quelques minutes.
Mon traquer psy finit par nous guider jusqu'à ce qui avait été le siège de l'Adeptus Arbites de la cité-ruche, où semblaient s'être retranché les leaders de la rébellion. C'était une position idéal pour diriger les opérations, grâce aux nombreux systèmes de communication que possédait ce bâtiment, et c'était aussi une véritable petite forteresse très facile à défendre. Il y avait là plusieurs soldats rebelles postés sur les miradors, observant le déchaînement de la bataille dans les niveaux inférieurs.
D'un geste de la main, j'appelai le soldat Jenkins chargé du poste radio, et j'établi une liaison cryptée avec le colonel Xarlos.
- Colonel ! Il semble que l'ennemi ait installé son quartier général dans l'ancien bâtiment de l'Arbites.
- Parfait, inquisiteur. Je vais immédiatement préparer une force d'assaut pour intervenir.
- Je vous conseille de garder vos troupes en réserve le temps que j'enquête plus en profondeur.
Mais le colonel ne me répondit pas, et coupa brutalement la transmission. Je savais qu'il m'avait parfaitement entendu, mais vu la tête de mule qu'était cet officier, je me doutais qu'il allait tenter quelque chose de très stupide. Restait à savoir si je pourrais l'empêcher. Ne perdant pas de temps, j'observais le bâtiment.
Le centre de l'Arbites avait été construit sur le rebord du cinquante-huitième niveau, dans un mélange de titane et d'adamantium pour lui permettre de résister à la plupart des dégâts pouvant être causés par des rebelles. Sauf que sa structure n'avait pas été prévue pour résister à un pilonnage par une batterie d'artillerie complète de la garde impériale. Les bombes à fragmentation avaient grandement affaibli la structure des défenses depuis le début de la bataille, et plusieurs parties du mur d'enceinte s'étaient affaissées. Cela avait également obligé les rebelles à ne laisser que les effectifs minimums pour surveiller le périmètre, afin de limiter les éventuelles pertes par des tirs d'obus chanceux.
Pour l'occasion, j'avais échangé mon habituel manteau long de cuir pour la grande cape de caméléonine que portaient habituellement les troupes Dunerriennes. Ces capes étaient conçues dans un tissu intelligent capable d'adapter sa couleur au terrain dans lequel elles se trouvaient pour camoufler au mieux leur porteur. Grâce à elle, mon escorte et moi pûmes approcher de l'une des brèches du mur d'enceinte sans alerter l'unique garde qui y patrouillait. J'étais en train de me demander comment nous allions le neutraliser... lorsqu'un obus lui tomba dessus et le vaporisa dans une explosion flamboyante.
Lorsque les débris de bétons mêlés de lambeaux humains retombèrent au sol, j'ordonnai silencieusement aux six troupes de choc de me suivre. Il n'y avait pas beaucoup plus d'ennemi de l'autre côté du mur que sur le mur lui-même, et nous passâmes totalement inaperçus. Nous étions devant une grande cour d'entraînement d'au moins huit cent mètres carrés, au sol criblé de cratères dont l'un nous accueillit chaleureusement. Autour de cette cour se trouvaient les bâtiments principaux de l'Arbites qu'il allait nous falloir inspecter, et où je me doutais que devaient se trouver un grand nombre d'ennemis. C'est alors que j'entendis un son qui ne me fit pas très plaisir : le ronronnement lointain de navettes de transport impériales.
Quatre transporteurs de classe Gemini approchaient avec lenteur. Ces vaisseaux typiques de l'armée Dunerrienne pouvaient être considérés comme les équivalents impériaux des Thunderhawk de l'Adeptus Astartes. Faisant environ vingt mètres en longueur, six en largeur et cinq en hauteur, ils pouvaient transporter plus de vingt-cinq fantassins chacun, et étaient bardés de tourelles de défense en tout genre. Ces vaisseaux étaient l'équilibre idéal entre capacité de transport, manœuvrabilité, résistance et puissance de feu. Mais malgré cela, je n'étais pas très rassurer de les voir rappliquer là. J'avais même un très mauvais pressentiment à leur sujet.
Comme en réponse à mes inquiétudes, un grand nombre de rebelles surgirent brusquement des casernes devant nous pour amener plusieurs caisses militaires au centre de la cour. Ces soldats étaient dirigés par un homme en manteau à capuche noir, que mon traqueur psy identifia immédiatement comme un psyker de niveau delta. Avec précipitation, les renégats ouvrirent les caisses pour en sortir des lance-missiles Jackhammer, des armes spécialement conçues pour abattre des appareils aériens, avec des senseurs spéciaux et un calibre de projectile supérieur aux missiles standards. En voyant apparaître ce terrible équipement, je me précipitais vers Jenkins et lui arrachais le communicateur de sa radio en ouvrant la ligne sur tous les canaux possibles avant de hurler :
- Ici l'inquisiteur Asphar Silverstein ! L'ennemi dispose de lance-missiles Jackhammer ! Que les transporteurs en approche se replient immédiatement ! Vous m'entendez ?
Naturellement, en hurlant aussi fort, j'avais attiré l'attention du groupe d'hérétiques, et plusieurs d'entre eux se tournèrent vers nous en levant leurs fusils mitrailleurs. Mais j'avais également atteint mon objectif : les navettes impériales commençaient à décrocher, virant de bord pour s'éloigner aussi vite que possible. L'instant d'après, pas moins de six missiles partirent de la cour pour filer vers les transporteurs, et mon escorte ouvrit le feu sur les rebelles depuis notre couvert. Trois navettes furent touchées au niveau des moteurs exposés par leur fuite, et leur système de propulsion fut presque intégralement détruit, suffisamment pour causer leur perte. Les trois énormes Geminis s'écrasèrent à quelques centaines de mètres de là. Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait beaucoup de survivants, et encore moins à ce que ces survivants puissent venir nous aider.
Le dernier transporteur du groupe avait esquivé deux des missiles rebelles grâce à une manœuvre particulièrement audacieuse et exécuté d'une main de maître : juste avant l'impact, le pilote avait coupé les moteurs un bref instant pour laisser son appareil chuter, avant d'activer la propulsion d'urgence qui l'avait fait décoller deux cent mètres plus bas, entamant dans le même temps un virage à quatre vint dix degrés qui avait laissé les missiles totalement incapables de le poursuivre. Celui qui était aux commandes de cet engin était incroyablement doué.
Alors que plusieurs rebelles utilisaient les caisses d'armement comme couvert pour entamer une intense fusillade contre mon groupe, les porteurs de lance-missiles commençaient à recharger leurs armes. Le transporteurs survivant ne s'était pas encore suffisamment écarté, et était encore très vulnérable à de tels projectiles. Nous devions absolument les empêcher de lâcher une seconde salve. Et pour cela, nous n'avions qu'une seule solution.
Arrachant ma cape de caméléonine pour m'alléger un peu, je bondit de notre couvert et ordonna la charge, faisant surgir les Serres d'Eridios de mes poignets. Les troupes de chocs me suivirent sans hésiter, et chacun d'entre eux dégoupilla une grenade qu'ils lancèrent devant l'ennemi qui se mit aussitôt à couvert. Aussi vite que nous le pouvions, nous courûmes vers eux en hurlant pour tenter de nous donner plus de force. Lorsque les grenades explosèrent, ils nous restait encore cinq mètres à parcourir. Nous étions presque sur eux lorsque plusieurs rebelles se relevèrent et se remirent à tirer. L'un des soldats à mes côtés fut touché au thorax, mais son armure lui sauva la vie, tandis qu'un autre moins chanceux reçu une balle dans l'œil droit. Son crâne fut perforé et il s'arrêta net pour s'effondrer sur le sol.
Une balle m'effleura la joue droite alors que je plongeais mes lames dans le corps de l'adversaire le plus proche. D'un mouvement circulaire, je l'ouvrai en deux, inondant ses comparses de son sang dans le but de les terroriser. Cela eut moins d'impact que je ne le pensais, mais me permit néanmoins de traverser le petit groupe ennemi pour me ruer sur les porteurs d'armes lourdes, quelques mètres plus loin. Le psyker en manteau noir voulu s'interposer et leva la main vers moi pour me lancer une décharge psychique. Avant qu'il ne comprenne que ses pouvoirs n'étaient plus là, je le décapitai et continuais mon chemin. Derrière moi, les troupes de choc avaient engagé le corps à corps avec les renégats et tentaient de les occupé. Bien qu'ils se battent à un contre deux, c'étaient des soldats vétérans affrontant de simples civils manipulés. Je savais qu'ils pouvaient s'en sortir dans cette situation.
Mais pas le transporteur.
Plusieurs lance-missiles avaient déjà été rechargés, et je me précipitai sur eux pour les neutraliser aussi vite que possible. Aucun d'entre eux ne tenta de fuir lorsque j'éviscérai les trois premiers, et je couru d'un homme à un autre pour les empêcher de tirer. Lorsqu'il n'en resta plus qu'un, je me rendis compte qu'il avait déjà levé son arme, et qu'il était à au moins dix pas devant moi. Pendant un instant, je cru qu'il me visais, mais en fait, j'étais entre lui et la dernière navette, sa véritable cible. Vainement, je couru vers lui en hurlant, dans l'espoir de le faire hésiter ou de le mettre en fuite, mais il ne broncha pas. Calmement, il ajusta sa visée et attendit que le missile se verrouille sur le Gemini. C'est à ce moment que je regrettai de n'avoir pas la moindre arme à feu sur moi. J'étais encore à cinq pas de mon adversaire lorsque j'entendis le bip strident du verrouillage de cible.
Soudain, une balle siffla à mon oreille et transperça le front de l'hérétique. Celui-ci resta immobile plusieurs seconde, le regard vide, avant de s'effondrer devant moi. Je fut étonné de n'avoir pas entendu de détonation. D'un mouvement bref, je me retournai pour voir qui était l'auteur de ce tir. Ma réponse se trouvait à environ six cent mètres de moi, et je du prendre mes jumelles pour la remarquer : accroché à un harnais de sécurité au milieu de la rampe d'accès latérale ouverte du Gemini, un homme équipé d'un fusil de précision tenait encore le rebelle en joue.
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